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Dysplasie du coude : diagnostic et traitement

Cet article s’adresse aux propriétaires dont l’animal présente une dysplasie du coude, diagnostiquée et qui souhaitent en savoir plus ou prendre le temps de mieux comprendre cette affection et ses traitements.

Épidémiologie et âge d’apparition

La dysplasie du coude est une affection héréditaire qui se met en place assez tôt dans la vie du chien (entre 4 et 6 mois). C’est une anomalie du développement des os du coude. Cette pathologie touche plus souvent les chiens de taille moyenne à grandes. Certaines races sont plus touchées : Labrador Retriever, Golden Retriever, Berger Allemand, Bouvier Bernois, Cane Corso, Terre Neuve. 50% des chiens ont une affection bilatérale même si le plus souvent un coude est plus douloureux que l’autre.

Dans un coude normal (Fig 1), les forces (Fig 2) sont réparties harmonieusement au travers du radius et de l’ulna (appelé cubitus chez l’homme). Les surfaces articulaires s’emboitent parfaitement dans les trois plans et le cartilage permet un glissement des surfaces articulaires sans frottement ou presque ; les surfaces sont congruentes.

differents os du coude  schéma répartition du passage des forces

  1. Figure 1 : Les différents os du coude. Coude normal. Visualisation du processus anconné et du processus coronoïde médial de l'ulna.

  2. Figure 2 : Coude normal. Le passage des forces est réparti 50% par le radius et par l’ulna. L’espace articulaire (ligne noire qui sépare les os) est de même épaisseur, le coude est dit congruent

  • Un ulna trop long par rapport au radius

Cela augmente le passage des forces lors de la marche au travers de l’ulna et provoque une fragmentation, une fissure, une fracture, une dégénérescence de la pointe nommée processus coronoïde médial (PCM).

  • Un ulna trop court

Cela augmente les pressions sur le processus anconné et pourra engendrer une fracture de ce dernier (non union du processus anconné ou NUPA)

Lors de dysplasie du coude, dans sa forme la plus classique, c’est à dire un ulna trop long, les forces sont anormalement réparties entre le radius et l’ulna (Fig 3). Cette malformation est à l’origine :

  • D’une atteinte de cette petite pointe en surplomb, le PCM
  • D’un frottement anormal des surfaces articulaires de la portion articulaire de l’ulna avec la surface articulaire du condyle de l’humérus en regard.

Ces frictions anormales vont progressivement éroder le cartilage du compartiment médial (ulna et humérus en face) jusqu’à mettre les os à nu (Fig 4).

dysplasie du coude avec incongruence  Différents stades d’atteinte du PCM

  1. Figure 3 : Dysplasie du coude avec incongruence. Répartition anormale des forces avec 35% par le radius et 65% par l’ulna, ce qui provoque par augmentation des forces sur le processus coronoïde sa fracture.
  2. Figure 4 : Différents stades d’atteinte du processus coronoïde médial (PCM) lors de dysplasie du coude vue lors de l’arthroscopie : Fissure avec cartilage articulaire encore intact sur un Golden Retriever de 8 mois, fracture du PCM sur un Labrador de 9 mois et érosion complète du cartilage articulaire du compartiment médial du coude sur un Berger Allemand de 14 mois.

Diagnostic

Le diagnostic est tout d’abord clinique et repose sur un examen orthopédique soigné. La réalisation de radiographies du coude (Fig 5) permet de confirmer la présence de remaniements arthrosiques dans ce dernier. Cet examen réalisé le plus souvent sous anesthésie générale est complété de radiographies des hanches afin de s’assurer de l’absence de dysplasie des hanches.
La réalisation d’un examen tomodensitométrique (scanner) est parfois nécessaire pour confirmer l’hypothèse.

Un premier examen radiographie de dépistage sur les races à risque est recommandé dès 4 à 6 mois.

Aspect radiographique normal d'un coude vs  coude arthrosique

Figure 5 : Aspect radiographique normal d'un coude (profil et face) et d’un coude arthrosique

Prise en charge d’une fragmentation du processus coronoïde médial (FPM)

Le retrait du PCM fracturé est réalisé sous contrôle vidéo (arthroscopie). On retire le ou les « cailloux de la chaussure » car les laisser si l’animal présente des signes cliniques provoque une dégradation sévère de l’articulation. Cette technique est non invasive par rapport aux techniques chirurgicales classiques et bien éprouvée avec plus de 20 ans de recul (Fig 4).

Toutefois, le retrait de ce morceau d’os fracturé dans l’articulation, bien que soulageant l’animal à court terme, ne règle pas le problème de l’incongruence articulaire. L’ulna est toujours trop long. Les pressions sur son cartilage toujours trop élevées. Si le cartilage est déjà érodé, les frictions os contre os restent très douloureuses pour le chien. Ces frictions vont générer une augmentation de la chaleur, des débris de cartilage provoquant de sévères et douloureuses inflammations : augmentation de la quantité de liquide articulaire, irritation des terminaisons nerveuses, développement d’ostéophytes et blocage de l’articulation (Fig 6).

Évolution arthrosique

Figure 6 : Évolution arthrosique d'une FCM sur un coude non traité
Photo A - Coude d’un chien Labrador Retriever à 6 ans
Photo B - Coude du même chien à 9 ans, présence d’une arthrose sévère

Prise en charge d’une incongruence articulaire : la P.A.U.L.

Pour améliorer la congruence articulaire du coude, plusieurs techniques chirurgicales ont été mises au point, basées sur la biomécanique du genou chez l’homme qui peut présenter un syndrome similaire. Nous ne parlerons que de la PAUL (Proximal Abduction Ulnar Osteotomy, www.kyon.ch/PAUL) car les autres techniques qui ont été proposées (SHO Sliding Humeral Osteotomy du Pr Fitzpatrick, CUE Canine Unicompartimental Elbow Arthrosplasty d’Arthrex®) présentent un taux de complication très élevé potentiellement catastrophiques et donc déraisonnable à nos yeux.

Le principe de la PAUL consiste à couper l’ulna à un endroit précis (proximalement) et à fixer les abouts avec une plaque en Titane spécialement dédiée dont la surface en contact avec l’os présente une marche de 2mm. Ce décalage permet de basculer la partie proximale de l’ulna pour soulager le compartiment interne du coude et permettre une meilleure répartition des forces pendant la marche (Fig 7). Cette technique présente peu de complication et avec plus de dix ans de recul et plus de 5000 chiens traités en Europe. C’est la seule option qui permet aujourd’hui de retarder, voire de stopper l’évolution inéluctable de l’arthrose et son cortège de symptômes douloureux et de boiterie mécanique (raideur de l’articulation).

D’après Vezzoni et al (conférence PAUL, Kyon, Zurich Nov 2018), concernant la réalisation de la PAUL, les résultats sont les suivants. L’étude porte sur la présence de signe clinique sur des chiens opérées (Fig 8).

modeles fixations Principe et réalisation de la PAUL 

Figures 7 : Principe et réalisation de la PAUL. Rééquilibrage des forces passant dans le coude, soulageant le compartiment médial de l’articulation (à droite). Fixation de l’ostéotomie par une plaque spéciale PAUL en Titane dont la face posée contre l’os présente une marche permettant le décalage des os (supra)

Exemple de George, Labrador de 11 mois

Figure 8 : Exemple de George, Labrador de 11 mois. On notera sur les radiographies une incongruence avec augmentation de la densité osseuse de l’ulna (flèche bleue) signant un passage de force trop important dans l’ulna, une fracture du PCM sur la vue en coupe au scanner (flèche rose), une érosion complète du cartilage articulaire lors de l’arthroscopie (le cartilage est blanc nacré et l’os à nu rose) et le traitement par PAUL. On note que l’arthrose n’a pas évolué un an après.

  • Chez les chiens opérés avant leurs 2 ans, on note une très nette amélioration clinique au bout de six mois post-opératoire et une absence de signe clinique dans 83% des cas à long terme, une absence d’amélioration clinique dans 17% des cas et aucun chien présentant une aggravation
  • Chez les chiens opérés entre 2 et 5 ans, on note une amélioration clinique de plus de 80% à long terme. Mais une plus grande prudence sur l’intérêt de l’intervention doit être discutée avec le propriétaire en fonction de chaque cas.
  • Après 5 ans, les lésions arthrosiques sont souvent telles que plus de 20% des chiens peuvent présenter une gêne plus importante en post-opératoire, ce qui n’est pas très encourageant. La PAUL sera alors envisagée si les traitements de l’arthrose ne suffisent pas à soulager le chien (en gros si on a tout essayé et qu’on ne peut que prendre le risque d’améliorer le chien).

Traitements complémentaires : injection de PRP

Lorsque le cartilage articulaire du compartiment médial est atteint, une fois le compartiment interne du coude soulagé des frottements néfastes par la PAUL, il est très intéressant de pratiquer trois injections intra-articulaires de concentrés de plaquettes (PRP d’Arthrex®).

En effet, il a été montré que le cartilage peut en partie « repousser » sur la surface abrasée grâce aux facteurs de croissance présents dans les plaquettes sanguines de l’animal surtout s’il est jeune, ce qui est un gage de confort au long terme pour le patient.

Traitements complémentaires : injection de particules d’or

Si le coude est trop arthrosique, le chien est trop âgé ou que les propriétaires ne désirent pas que l’on réalise une intervention chirurgicale nécessitant un repos post-opératoire, des traitements médicaux classiques seront mis en place : anti-inflammatoires non stéroïdiens, corticoïdes, aliments spécialement adaptés pour limiter les effets indésirables de l’arthrose, chondroprotecteurs, oméga-3, phytothérapie, rééducation fonctionnelle (ostéopathie, tapis de marche immergés, laser…)

En complément, nous pourront réaliser des injections d’acide hyaluronique, mixées avec des micro-particules d’or (technique Goldtreat® ; Traitement local de la douleur arthrosique par les implants d’or) et nous espérons dans l’avenir d’autres techniques qui sont en développement actuellement : prothèse de coude, cellules souches, injection intra-articulaire de radionucléides (Synovetin OA)…

Comme nous pouvons le constater, de grands progrès ont été réalisés ces 20 dernières années mais le traitement de la dysplasie du coude reste toujours un challenge diagnostique et technique, financier, affectif et parfois frustrant. S’il est possible de pratiquer une arthroscopie avec retrait des morceaux fracturés et de rééquilibrer les forces par une PAUL avant que les dégâts ne soient irréversibles, c’est toujours mieux pour le confort de l’animal à long terme.

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Nous sommes à votre disposition pour tout renseignement supplémentaire.
Dr. Guénégo et toute l’équipe de la Clinique Vétérinaire du Vernet.

 

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